Ce que la méthode Iyengar a apporté à ma pratique et ce qu’elle apporte à mon enseignement du Yoga.
- eloesprityogi
- 23 juil. 2022
- 5 min de lecture
Vous avez déjà certainement dû entendre parlé de la méthode Iyengar et sa réputation la qualifiant de posturale et rigoureuse. Je n’emploierai pas le terme de « Yoga Iyengar » car B.K.S Iyengar s’y refusait, rappelant que le Yoga est Sarva Bhauma, pour tout le monde, universel, sans distinction entre les différents univers ou méthodes de yoga :
« Considérez l’essence et ne soyez pas abusés par les noms ».
Je vous propose de partager de ce que la méthode Iyengar a apporté à ma pratique physique, spirituelle ainsi qu'à mon enseignement.
Petite histoire de la méthode Iyengar
La méthode Iyengar a été créée par Bellur Krishnamachar Sundararaja Iyengar (1918-2014) et exposée dans son livre Light on Yoga publié en 1966.
Né dans le petit village de Bellur (Karnataka) le 14 décembre 1918, et enfant chétif à la santé fragile, il fût initié au Yoga par son beau frère Sri Tirumalai Krishnamacharya; qui lui enseigna quelques asanas afin d’améliorer sa santé. Cependant, il refusa de continuer son enseignement sous prétexte qu’il n’avait aucun don pour cet art car son corps gardait les séquelles de nombreuses maladies infantiles (typhoïde, malaria, tuberculose).
BKS IYENGAR décida donc de continuer seul son enseignement en ayant l’idée d’introduire des supports (briques, chaises, foulards et couvertures) afin d’adapter les asanas à son corps. Il devint ainsi son propre maître et son premier élève.
Dans son centre à Puna, BKS IYENGAR recevait ses « patients/élèves » et leur préconisait des asanas adaptés à leur maux. Marié et père de six enfants, il a voué sa vie à sa famille (démontrant ainsi que l’on pouvait devenir Maître sans pour autant être renonçant) à l’enseignement et à l’étude des bienfaits des asanas, se servant de son corps pour expérimenter ses théories.
Surnommé affectueusement "Guruji" par ses élèves, il s'éteindra en 2014, à l'âge de 96 ans.

Une méthode respectueuse et bienveillante, entre tradition et modernité.
Dans la tradition du Hatha Yoga, BKS IYENGAR a créé un mode de yoga puissant, généreux, d’une grande richesse, empli de bienveillance et d’humanisme. Ses enfants et petits-enfants continuent d’honorer et de perpétuer son incroyable et très riche enseignement.
Sa fille et élève, Gita Iyengar, grande yogini diplomée en philosophie et en ayurvéda, a écrit le premier livre de Yoga destiné aux femmes, Yoga – Joyau de la Femme – en omettant aucune étape de vie propres aux pratiquantes : menstruations, grossesse, ménopause... .
C'est un livre d'une grande modernité pour son époque, et qui personnellement constitue un outil de travail précieux pour l'élaboration de mes cours.

Gita.S Iyengar - Illustrations de Yoga, Joyau de la femme.
Les effets « thérapeutiques » de la méthode Iyengar sont aujourd’hui avérés, certains hopitaux sont d’ailleurs dotés d’unité « Yoga Iygengar » pour la prise en charge des maladies dégénératives comme Parkinson ou la sclérose en plaque.
Comment se déroule un cours de Yoga Iyengar.
Tout d’abord, sachez le, jamais d’eau ni nourriture dans une salle d’Iyengar ! Gardez vos gourdes et en-cas au vestiaire 😊 .
Deuxième point important si vous n’avez pas pris Sanskrit en LV2, vous risquez d’être un peu déstabilisés car les noms des postures sont exclusivement annoncé par leur nom originel. Mais c’est ce qui vous permettra de vous connecter à l’essence même de l’asana. Et c’est tellement plus beau à l’oreille !
Les cours du Yoga Iyengar sont organisés par niveaux (Débutant, intermédiaire et avancé), l’enseignement est progressif et permet de pratiquer de façon sécuritaire, à l’écoute de ses sensations corporelles.
Ne soyez donc pas étonnés si, bien que vous pratiquiez le yoga depuis plusieurs années, l’enseignant vous invite à vous inscrire en cours base . En effet, c’est en cours de base que l’apprentissage des postures, la méthodologie de l’alignement, les points clés anatomiques des asanas sont enseignés. Et croyez moi, vous ne vous y ennuierez pas !
Un cours dure en moyenne 1h30. On démarre par les invocations (invocation à Patanjali et OM), puis un temps de centration, l’observation du souffle, l’échauffement, et la préparation aux asanas.
Les asanas sont ensuite pratiqués à l’aide de supports (murs, chaises, couvertures, sangles, briques, bolster).

Les séries peuvent être plus ou moins dynamiques et les asanas sont sélectionnés en fonction du thème ou point clé anatomique de la séance.
L’attention est portée sur l’alignement des différentes parties du corps dans l’espace (proprioception) , les postures s’organisent de façon cohérente et progressive , le rythme varie selon les cours et les niveaux, et on reste plusieurs minutes dans les postures pour en ressortir les effets et les bénéfices. Enfin, il y a toujours une posture inversée afin d’équilibrer le système nerveux.

BKS Iyengar - Sirsasana
On termine enfin par un savasana réparateur.
Quant au Pranayama, il est introduit tardivement dans la pratique, lorsque les asanas sont maîtrisées.
Selon votre condition, l’enseignement adaptera les asanas avec des supports. Les supports servent également à démontrer un point clé et sont des outils pédagogiques essentiels et incontournables. Des alternatives à certains asanas sont prévues pour les femmes indisposées ou enceintes.
Mon expérience personnelle.
La méthode Iyengar a été pour moi une grande révélation. J’avais énormément d’à-priori et je la considérais comme une méthode un peu vieillotte, trop statique, rigide et pas « très fun ». Les enseignants ont également la réputation d’être assez « sévères ». J’avais une préférence pour les cours construits avec des enchaînements, des flows, les méthodes de yoga plus créatives et fluides, qui ne sont pas compatibles avec le matériel utilisé pendant un cours d’Iyengar.
C’est au cours de ma formation de professeur de Yoga que j’ai pu découvrir les bienfaits de la méthode Iyengar. Lorsque vous avez pour professeur de pédagogie posturale un professeur d’Iyengar, vous ne pouvez qu’être en confiance sur la qualité de l’enseignement des asanas. Mais également de leur histoire, bienfaits, contre-indications, leurs effets sur le corps, le système nerveux, le mental. Je ne pensais pas qu’il était possible d’entrer en méditation dans un asana et d’en ressortir avec des courbatures !
Après ce premier weekend de formation de professeur de Yoga (où j’ai réellement compris ce qu’était Utthita Trikonasana !!!) , j’ai choisi de continuer les cours avec Isabelle Lecomte afin de perfectionner mon apprentissage mais également de continuer à explorer cette nouvelle pratique et ces bienfaits. . Sa douceur et son incroyable générosité font d’elle un professeur d’une grande valeur. Chacun de ses cours est une histoire, elle vous guide avec une énergie et une précision telle qu’il est très rare qu’elle ajuste physiquement un élève, ce qui est pour moi gage d’un enseignement de qualité. Je m’étonne encore du niveau de précision dans de ses indications car certes, un cours d’Iyengar est intense par la rigueur et la concentration qu’il exige. C'est d'ailleurs ainsi que je parviens à mieux canaliser mon mental dissipé (je suis Vata !)
Côté philo et spiritualité, là encore je n'ai pas été déçue, les nombreux livres écrits par BKS Iyengar sont d'une clarté et permettent une relecture plus aisée des textes traditionnels. Certains sont des recueils de conférence qu'il a donné aux quatre coins du monde et son riches de ses expériences personnelles en tant que pratiquant et enseignant. Je vous recommande de commencer par l'Arbre du Yoga, accessible.
Vous trouverez ces ouvrages sur le site de l'Association Française de Yoga Iyengar :
Pour conclure, je dirai que je n’ai jamais pris autant de plaisir à pratiquer et étudier depuis que j'ai découvert la méthode Iyengar.
Cela est peut être dû qu’en « mûrissant », je recherche le sens et non plus la performance, la précision plutôt que le créatif. Je suis en quête permanente de sensations nouvelles, chaque cours est une nouvelle découverte, mon tapis est devenu un terrain de jeu, d’exploration. Et ce que j’ai appris sur mon tapis, je peux également l’enseigner et le partager avec mes élèves.
Car nous sommes finalement légitimes à enseigner ce que nous avons nous même expérimenté.

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